Lors du Festival international de poésie de Trois-Rivières (FIPTR), la soirée Tango et poésie, qui est devenue une tradition au fil des ans, était présentée au Musée québécois de culture populaire, le samedi 8 octobre dernier. En partenariat avec l’UQTR, cet événement est organisé par France Joyal, professeure au département de philosophie et des arts. Pour cette édition, la musique a été confiée au trio Tango Boréal, et la section poésie, à Samantha Barendson.
Dans une ambiance inédite aux soirées tango plus conventionnelles, où lumières tamisées et couleurs sombres sont habituellement à l’honneur, les murs blancs et l’éclairage franc du musée contrastaient avec la chaleur du tango. Par contre, les musiciens du trio Tango Boréal ont donné, dès leur premier morceau, toute la chaleur nécessaire pour amorcer une soirée fort agréable. C’est le son particulier du bandonéon qui offre la grande beauté à cette musique.
Le bandonéon fait partie de la famille des instruments à anche. Bien qu’il soit originaire de l’Allemagne et ne se soit greffé au tango qu’à la fin du XIXe siècle, il est maintenant tout à fait emblématique de cette musique. Dans le trio Tango Boréal, Denis Plante assure le maniement de l’instrument. En plus d’être une des figures phares des bandonéonistes du Canada, il est aussi un important compositeur contemporain et leader de son groupe. À ses côtés, le guitariste international David Jacques offre des envolées succulentes et partage son réel plaisir d’être sur scène. La contrebasse de Ian Simpson confère des sonorités jazz et blues, ce qui fait de cet ensemble sa particularité.
La Franco-Argentine Samantha Barendson a fait la lecture de plusieurs textes, présentés en alternance avec cette musique délicate. D’après ses textes, elle a grandi en Argentine, mais a vécu en France, ce qui explique qu’elle écrit aussi bien en espagnol qu’en français. Pour cette soirée, elle a donc lu des textes dans les deux langues, souvent durant la même intervention. Les deux versions du poème étaient lues en alternance, strophe par strophe. Lorsqu’elle a raconté son exil de l’Argentine et son retour, les émotions étaient beaucoup plus graves et ressenties dans la version espagnole. Comme quoi, la langue colore tout à fait un texte.
La poétesse a judicieusement sélectionné l’ordre de ses lectures pour présenter, sans lourdeur trop intense, des textes plus durs qui abordent la dictature et l’exil.
Entre poèmes plus lourds et musique rythmique plus ludique, Barendson a ponctué ses lectures de poésie aux tendances humoristiques. Elle observe des danseurs de tango et fantasme à rejoindre leurs rangs. La rythmique de son texte sur la pratique du tango est excellente, ce qui ajoute à l’effet comique de ses images. La poétesse a judicieusement sélectionné l’ordre de ses lectures pour présenter, sans lourdeur trop intense, des textes plus durs, qui abordent la dictature et l’exil. Samantha Barendson est également une interprète remarquable. L’aisance avec laquelle elle livre sa poésie, le rythme et la modulation de sa voix supportent impeccablement ses mots.
Tout au long de la soirée, les participants étaient invités à utiliser les planchers de bois du musée pour effectuer quelques pas de danse. Cette danse codifiée, mais qui laisse une large place à l’improvisation, est impressionnante. Les partenaires sont corps à corps et tout se joue dans l’écoute de l’autre, dans l’écoute du corps de l’autre. Pas étonnant que cette danse soit si sensuelle.